Retour sur mai, le 17 juin 1968
lundi, 23 juin 2008
Spécial, annonce ce numéro de ELLE sorti il y a tout juste 40 ans, le 17 juin 1968. Seulement 32 pages en noir et blanc avec quelques touches de orange et pas une seule pub pour un numéro qui compte pourtant triple, puisqu'il est affiché étant le 1171-1172-1173. Le cours de choses a été bousculé.
On va dès la deuxième page à l'essentiel. Robert Kennedy a été assassiné. Sur une petite photo, on le voit poser en famille avec son épouse et leurs dix enfants. Le onzième, une fille, naîtra en décembre 1968.
Elle s'est agenouillée. Il y a avait du sang, du sang. Elle a murmuré : "Mon chéri, je suis là." Le brouhaha, les reporters, la lumière blanche de la télévision, toujours présente, et le destin, l'atroce destin qui passe. Maintenant elles sont deux. Ethel Kennedy, après Jacqueline Kennedy écrit Stanislas Fontaine.
Jacky, le regard perdu, revit d'atroces souvenirs. Dallas, le sang indique la légende photo.
Pages suivantes, on trouve un sommaire orange et un long édito signé Hélène Gordon-Lazareff, dont voici un extrait :
La crèche de la Sorbonne accueille les enfants des étudiants, dans six salles situées au troisième étage du bâtiment principal, loin du tumulte des amphis.
Créée pour répondre à l'urgence au début des événements, cette garderie ne sera pas provisoire, les étudiants tiennent à en faire un service. Soixante enfants de 3 mois à 8 ans y sont accueillis.
Albertine-Colombe a six mois, et il s'en est passé sous ses fenêtres. A la première grenade, au lit avec un somnifère, raconte sa mère, Denise Dubois-Jallais, rédactrice à ELLE. Mais qu'est-ce qu'ils veulent, s'est-elle demandé. Je me reprochais de ne pas m'être intéressée à leurs problèmes, de ne pas être au courant de leurs revendications, de n'avoir pas suivi leur actualité, pas à pas. D'avoir pu confondre le chahut périodique de leurs bizuthages et celui de leurs manifestations. Sébastien, 7 ans, n'osait pas répéter en criant ce qu'il considérait comme une formule parfaitement grossière. Mais il trépignait : "Allez vous-en imbéciles ! " à la police.
Denise Dubois-Jallais évoque aussi la fille aînée de son mari, 17 ans, qui lui a dit : Tu sais, si je ne suis pas révolutionnaire maintenant, je me connais, je ne le serai pas dans cinq, six ans, alors j'en profite.
Pour illustrer l'article, la photo d'une petite fille. Approximativement, même âge, même coiffure, même allure que ce qui devait être les miens en 68. Mais je n'avais pas de parents manifestant dans les rues de Paris...
Marie-Madeleine Dienesch est secrétaire d'Etat à l'Education nationale. Elle voudrait voir plus de femmes ministres, ne considère pas que le fait d'être une femme ait nui à sa carrière mais déplore que les hommes donnent des complexes aux femmes en leur faisant croire que la politique est une chose horriblement compliquée à laquelle elles ne comprendront jamais rien.
Ariane a 17 ans et demi, elle est brillante élève de terminale au lycée X. Son père, 43 ans, a connu une enfance pauvre, une cruelle adolescence de guerre et met un point d'honneur à lui ménager une jeunesse confortable et sans souci. Ariane ne va pas passer le bac comme prévu, elle ira en stop au lycée, y faire de la politique, contre l'avis de son père. Faute d'essence, il finira par l'accompagner à vélo à une réunion d'informatin à laquelle sont invités les parents.
Bon, mais la mode, alors ? C'est un choix, explique Claude Berthod. En dix ans, les bottes, les capes, les jupes-culottes sont devenues aussi courantes, aussi naturelles que les berlingits de lait en craton et les mouchoirs Kleenex. Dans dix ans, on s'étonnera... de nos étonnements devant les pionnières qui vont aujourd'hui travailler en pantalon, ou des fastidieuses batailles de l'ourlet rallumées à chaque saison : jupes courtes ou moins courtes ? Mais vous ne demandez la permission de personne pour porter vos cheveux longs ou courts, vous choisissez ce qui vous va le mieux !
La mode est en Bon Magique : t-shirt, bermuda, ceinture, sac fourre-tout, pantalon, chemisier, jupe, foulard...
L'horoscope ferme le bal. Il est signé Francesco Walner et illustré par Roman Cieslewicz.
Vivement lundi prochain !
15 commentaires
Les Kennedy, je me demande parfois porquoi ils s'obstinaient à faire de la politique!?
Pas pris une ride l'édito de Lazareff, encore tellement d'actualité !
Le look de la brindille ceinturée, tout de noir vêtue, avec son bag
XXl vernis, est intemporel...
Un numéro COLLECTOR !! Encore un ;) et quelle sobriété ....
En revanche, aujourd'hui, ELLE s'interesse encore à ses lectrices ?
Je te maile pour le PHOT'ART ;)
Comme le dit mariga(z) c'est un vrai collector celui-ci. J'adore la couv
mouai drole de karma cette famille kennedy ou trop accro au pouvoir ?
Mai 68,naissance de mon homme.Quand j'écoute ses parents c'était la guerre!Plus de lait dans les magasins!
Sinon les Ellettes sont mignonettes,si j'avais une pitchounette tiens...
Tiens,un clin d'oeil à Cieslewicz,très pop!
Ces dessins existent en affiche colorées:
http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://imagecache2.allposters.com/images/pic/NIM/MM1094~Her-Horoscope-Posters.jpg&imgrefurl=http://www.allposters.com/-sp/Her-Horoscope-Posters_i1121035_.htm&h=450&w=337&sz=50&hl=fr&start=9&um=1&tbnid=wDhjJx5niAA0eM:&tbnh=127&tbnw=95&prev=/images%3Fq%3Droman%2BCieslewicz%2Bposters%26um%3D1%26hl%3Dfr%26sa%3DN
Pour toi quelques images plus tardives dont certaines n'auraient pas déparées en 68:http://www.galeriedujour.com/gdj/exposition/gdj/expo-11.html
tu le chouchoutes hein ce numéro? Il est incroyable!
Tu sais que je parlais avec une femme l'autre jour à mon boulot, qui me racontait que, quand elle était arrivée à Déprimeland dans les années 60, elle n'avait pas le droit de travailler en pantalon?...
Punaise! c'est pas loin pourtant les 60's... ne pas oublier, les filles, ne pas oublier...
C'est bien la première fois que je lisais un édito, tiens!
MOi j'aimerais bien un horoscope aussi joli, maintenant. parce qu'ils sont tous vilains.
Et comme je lis pas, si je regarde les images, ça sera déjà ça de pris....
Bon, pis on voit que Le P'tit Nico, il lisait Elle, vu qu'il a mis des femmes au gouvernement. Non?
"Tu sais, si je ne suis pas révolutionnaire maintenant, je me connais, je ne le serai pas dans cinq, six ans, alors j'en profite." Tout est dit...
Bonjour Frieda, ton billet ne fait que approfondir mon envie de révolution,;) cette fois pour plus d'humanité et pour le courage pour la défendre et pour ceux qu'on fait souffrir
...
et j'admire toujours les femmes qui ont le courage de faire la politique même si aujourd'hui on dit que c'est devenue plus facile!
L'article sur les Kennedy me fait penser à ce qu'il y a vraiment des destins bizarres.
Pour la note de légèreté et de mode:
J'adore ces petites robes droites et sobres :)
A bientôt
@M1 : le goût du risque ?
@Sunny : Lazareff, quoi !
@Ithaa : on en ferait bien son 4 heures, non ?
@Mariga(z) : j'aurais envie de dire que non. Pour le ELLE, pas pour Phot'Art ! Et merci !
@Anna : j'ignorais que ELLE n'avait pas paru durant 3 semaines...
@Florence : et sur plusieurs générations...
@Maquettes : merci pour les liens, j'aime beaucoup ce graphisme.
@Benetie : ne pas oublier, non !
@Camille : il n'a pas innové, y'a quand même eu Simone et son IVG.
@April 22 : quelle lucidité, à cet âge !
@Miss Doodle : j'ai pensé à toi, pour l'esprit de révolution !
Que Marie Madeleine se rassure, c'est fait, les femmes au gouvernement. Et la crèche à la Sorbonne, c'est si mignon! Vraiment 1968, quelle année!
C'est un bon numéro ce ELLE et quand je pense qu'a cette époque le seul futur pour presque toutes les femmes c'était le mariage et faire des enfants au détriment d'un épanouissement personnel comme on disait souvent les années suivantes.
C'est drôle, j'imaginais pas comment la France s'était vraiment arrêtée pendant les évènements de mai 68! Dis moi, c'ets la petite de 6 mois ou la mère qui a pris un somnifère? Tu m'inquiètes, là...
PS: à chacun de tes ELLE VINTAGE, j'ai l'impression que la mode était moins faite de diktats, à l'époque, me trompé-je???
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