vendredi, 20 mars 2009
Ah Pascal, si tu saviez !
Pascal, (vous permettez que je t'appelle par votre prénom ? Même si je reconnais que je préfère cependant te vouvoyer, on ne se connaît pas, c'est vrai).
On se connaît pas mais je peux bien vous avouer que j'ai lu l'un de tes livres quand j'avais 20 ans. Oui, je sais, ça commence sérieusement à dater. Lunes de fiel, ça devait s'appeler. Et je me souviens même que j'avais enchaîné avec le Nouveau Désordre amoureux, que vous aviez cosigné avec Alain Finkielkraut. Le désordre amoureux, tu penses si ça me causait, au milieu de ce foutoir généralisé qu'était ma vie à 20 ans. Mais c'est tout ce dont je me souvienne. Je serais bien incapable d'en faire un résumé, même si je crois que ça m'avait semblé pas mal distrayant. Enfin, surtout le roman. Et surtout une fois que Roman Polanski en avait fait un film qui ne passe pas pour être le meilleur qu'il lui ait été donné de réaliser. Mais ne soyez pas fâché, tu sais, c'est tout le temps que j'oublie ce que j'ai lu, ce que j'ai vu, ce que j'ai entendu...
Et j'avais sûrement dû lire aussi votre papier paru dans ELLE en 2003, lorsque tu avais été invité à livrer votre point de vue dans une chronique que tu avais sobrement intitulée La pétasse triomphe au moment où le macho décline.
Qui décline son idendité en péril, le macho, à la manière d'un ineffable Zemmour (mais non, ne pleurez pas, Eric, grand sensible va, qui sait, peut-être qu'un jour je t'écrirai, à vous aussi ?)
Sauf que vois-tu, Pascal, votre analyse non plus, je ne m'en souvenais plus. La pétasse demeure une énigme, écris-tu. Les méandres de ma mémoire si sélective également.
C'est grâce à mon amie Sunny Side, que j'ai pu relire cette chronique. Mais si, Sunny Side est mon amie ! Même si elle ne s'appelle pas Sunny pour de vrai et que je ne l'ai jamais vue. Mais ne fais donc pas l'étonné, enfin, vous savez bien que je ne m'appelle pas Frieda non plus.
Je viens de la relire, votre chronique dont je ne me souvenais pas que tu l'avais écrite, sous l'angle de la mode. Celle qui se démode si vite.
Et j'ai été déçue. La pétasse n'est manifestement plus ce qu'elle était, aurait-elle atteint son apogée vestimentaire au début des années 2000 ? Ainsi la décris-tu : De même que les femmes d'autrefois, en crinoline, gaine et corset, n'étaient pas si honnêtes qu'elles en avaient l'air, celles d'aujourd'hui, harnachées, saucissonnées, ne sont pas si délurées qu'on le croit. L'impudique n'est pas toujours synonyme de fille facile. Il s'agit surtout de capter l'attention du Prince charmant : à tous ses atours, Cendrillon rajoute la ficelle dans le derrière, le soutien-gorge pigeonnant, le débardeur au dessus du nombril et le pantalon ultra-moulant. Six ans ont passé et on ne voit presque plus de débardeurs au dessus du nombril. Pas même dans ma ville que j'aime pas. Pour dire si c'est un signe que la chose a désormais atteint le summum de la ringarditude.
Je peux bien te l'avouer, à vous, sans risquer que tu me prennes pour l'infréquentable réac que je ne suis pas ? J'ai hâte qu'il en aille de même des tatouages.
Cette pétasse qui demeure donc une énigme, écrivez-vous, est tellement aliénée aux normes en cours qu'on la soupçonne de rébellion. Tellement offerte, abandonnée, qu'elle en devient inaccessible. Elle annonce trop la couleur pour que le message ne soit pas brouillé. Sa surenchère dans la provocation ressemble à un pied de nez aux préjugés ambiants reconduits et désamorcés en même temps. Comme si elle se réappopriait les stéréotypes de la femme objet, de la bête sexuelle, et les tournait signe de puissance, non de soumission.
Si je te résume, vous laissez entendre que la pétasse pas si libérée qu'on veut bien le dire n'est pourtant quand même juste qu'une grosse maligne trop rebelle ?
Parvenue à ce point de ton décryptage, je me demande où donc est passé ce fameux macho qui décline que vous nous avez vendu dans ton titre ? A-t-il purement et simplement tourné casaque devant tant de perfidie pétassière ? Vous n'en faites guère état, du déclinant, tout au long de cette analyse !
Une chose est sûre cependant : alertée quant à la subtile maîtrise de la subversion qui serait selon toi celle de la présumée pétasse dont le string ne dépasse plus que rarement d'un pantalon moulant qu'elle ne porte d'ailleurs quasiment plus non plus, je la regarderai d'un autre oeil le jour où j'en croiserai un spécimen en allant acheter mon pain.
Allez, j'ironise mais pourtant je peux bien te le dire, j'aime beaucoup votre manière de conclure : Sous le string de la pétasse, il y a toujours un coeur qui bat.
Et j'ajouterai : sous un shorty fabriqué en Chine en 2009, aussi. Et pareil sous un tchadri.
PS1 : avez-vous vu si je suis tout de même sympa, j'ai illustré ce billet avec une photo de toi quand vous étiez encore presque jeune !
PS2 : et dire que pendant ce temps-là, sur Arte, il y en a qui en sont à programmer un film avec Adjani intitulé La Journée de la jupe...
13:49 Publié dans C'est que mon avis | Lien permanent | Commentaires (21) | Tags : elle, pascal bruckner | del.icio.us | Facebook
Commentaires
Un coeur qui bat, comme sous le col roulé de l'écrivain grisonnant, carrément.
Écrit par : Cat | vendredi, 20 mars 2009
Punaise, Fri.
Ce billet, il mériterait d'être tiré en 35 000 exemplaires, plus un, géant. Pour moi, que j'encadrerais chez moi.
Parce que c'est franchement extra.
Écrit par : Camille | vendredi, 20 mars 2009
Waouw ! Comment tu passes d'un customizage de boutons suédois au fouet .... J'en reviens pas... J'adore :))
Écrit par : mariga(z) | vendredi, 20 mars 2009
certes, j'ai plein de trucs à dire.... Mais comme je fais semblant de bosser.... Pas que je paraisse trop concentrée, ça paraîtrait louche.... Je reviendrai sans string et sans brioche à l'air, ça va de soit !
Écrit par : mariga(z) | vendredi, 20 mars 2009
Chère, très chère, admirable et charmante Frieda (titre détourné d'un Perec),
Pour faire pétasse, je dirais tu me troues le ... ! J'adore, la femme multiple que tu es... Je m'en vais écrire à ELLE pour qui te mette rédac en chef, qu'ils virent c'tte Gironde de l'Aine. Mais es-tu parfaitement d'accord avec lui ? Tu aismes son style, tu comprends bien ce qu'il veutr dire, tu soutiens les causes féminies, mais dans le fond franchement un peu de distinction, de respect... Mais promis je vais essayer d'être indulgente quand j'en croiserai une (et ici il y en a pas mal dans le genre et même encore avec l'équipement total décrit, sisi..). Parce que autant faire mon mea culpa mais je juge souvent quand je croise ce genre...
Écrit par : sarah | vendredi, 20 mars 2009
Alors là, je m'incline. Réverence
Écrit par : stephanie | vendredi, 20 mars 2009
God Fri t'allume ! Je reviens on sonne !!!
Écrit par : Sunny Side | vendredi, 20 mars 2009
Ciel une pétasse !!!
Écrit par : Sunny Side | vendredi, 20 mars 2009
Non mais le mec il n'est pas con du tout! il pose un problème essentiel : la salopification de la pétasse!
Allez hop, ça me fait un bon sujet de livre ça!
Pour la journée de la jupe, j'espère qu'Arte a prévu une caméra embarquée!
Écrit par : M1 | vendredi, 20 mars 2009
Oh la la, ma Fri !!! C'est le teaser du vintage de lundi que tu nous fais là ? Je pourrais en écrire des tartines, mais je trouve que ça ne les mérite pas ! C'est tellement ... tellement ... tellement ... mauvais Télérama de la tendance du bithume ?! Tout ça pour ça ... Et encore une généralisation abusive au passage. Je t'admire !
Écrit par : Catherine | vendredi, 20 mars 2009
Au fond, la pétasse elle est tellement pétasse qu'elle allume mais qu'y a rien derrière. Suis d'accord pour dire que c'est le comble de la pétasse-itude. Mais en même temps, la pétasse est une conne, donc si elle brouille les pistes, c'est forcément pas "en exprès". J'en connais plein des. Même que chez moi, y'en a des qui mettent toujours des débardeurs qui arrivent au nombril, et que l'arrivée des beaux jours va pas arranger les choses...
Écrit par : zabou | samedi, 21 mars 2009
Fri ce qui m' a intrigué dans ce texte, ce sont entre autres ces phrases: "le diktat de l'explicite signifie d'abord la fin de l'intimité: il faut afficher son pedigree libidinal en public ... se déshabiller moralement à la télévision... avec surexposition des dessous, gonflements des lèvres et de la poitrine, vocabulaire hardi etc...et aussi "la bourgeoise s'habille en bimbo pour réaliser ce cocktail singulier: une salope éternellement jeune.(j'en croise plein) La pouffitude avec son emphase mise sur le lourd, l'épais n'est évidemment PAS LE SEXY mais son exagération, sa dégénérescence baroque à visée publicitaire ". Ce que David Lachapelle illustre parfaitement. EN 2003 c'est le Porn chic de Tom Ford ... Quant à Pascal si tu saviez, il a juste cette phrase: "Nous leur en voulons de nous attirer à si peu de frais et ... pourtant nous ne pouvons détacher nos yeux de leur chair étalée". Poor Pascal ...
Écrit par : Sunny Side | samedi, 21 mars 2009
On rigole au moins!
Hier Bernik a vu une pétasse. Elle avait le cul à l'air.
Carrément.
La robe c'était une tunique et elle avait un string. Enfin il suppose qu'elle en avait un.
Pourquoi elle est sortie de chez elle comme ça avec sa copine?
On ne le saura jamais.
Vraiment bien écrit ton article.
Écrit par : lavieenrouge | samedi, 21 mars 2009
Oh putain! y a même une pub pour pétasse au dessus de pascal!
Tu fais fort.
Moi je bosse pour Danone au moins. :)
Écrit par : lavieenrouge | samedi, 21 mars 2009
@Cat : sûrement. De midinette, même, un peu ?
@Camille : tout ça, t'es sûre ? :)
@Mariga(z) : au fouet ?! Non mais lol, quoi.
@Sarah : ah, charmante Sarah, il m'arrive encore d'en croiser par ci par là, du nombril, mais ça se raréfie tout de même. En revanche, le tatouage pseudo tibétain, c'est pas le cas, parce que ça dure, en plus, cette saloperie :)
@Stéphanie : eh bien...
@Sunny Side : driiiiiiing !
@M1 : je savais que je pouvais compter sur toi !
@Catherine : m'admire pas, je me suis tellement amusée !
@Zabou : ni pour les tatouages de beauf non plus ! :)
@Sunny Side : oh ben tu penses si j'ai pas tout mis ! C'eut été indigeste, un peu.
@Lavieenrouge : mais on en voit de drôles de choses, par chez toi, décidément ? C'était un genre de chasse au jackpot, tu crois ? :-))) Je la vois pas, la pub, elle fait comme elle veut, hein, à apparaître et disparaître n'importe quand, pas encore réussi à la choper, la CCB, c'était celle-ci ?
Écrit par : frieda l'écuyère | samedi, 21 mars 2009
Mais qu'est-ce que cette histoire de nombril à l'air, chère Frieda ? ;-) Ah, je m'instruis beaucoup en venant chez vous et je suis pleinement d'accord avec Sarah: vous devriez être rédactrice en chef d'un magazine féminin.
J'ai un intérêt tout particulier pour cette phrase que vous citez
"comme si elle se réappropriait les stéréotypes de la femme objet, de la bête sexuelle et elle les tournait en signe de puissance, non de soumission."
Je ne sais ce que vous pensez de cette phrase en particulier, mesdames, mais je croise de plus en plus des femmes qui me font cet effet dans le quartier...
Écrit par : Le vieux pull | lundi, 23 mars 2009
et ben, moi de ce pascal je n'avais lu que les voleurs de beauté à l'époque j'avais aimé, depuis la plupart de ses propos ont toujours tendance à m'agacer et toi là desssus tu poses ta prose avec brio je dis bravo !
Écrit par : Nad | lundi, 23 mars 2009
@Le vieux pull : mais dans quel quartier vivez-vous donc, cher vieux pull ? :)
@Nad : agacée je suis, moi aussi ! Me souviens de son face à face avec Zemmour sur une histoire de mari qui avait rétréci, l'un des ses derniers livres, ça me rappelait la chanson "Mon père m'a donné un mari, mon dieu quel homme, quel petit homme !" et puis plouf.
@ M1 : si tu passes par ici, je te vois venir, je sais à qui tu vas faire allusion !
Écrit par : frieda l'écuyère | lundi, 23 mars 2009
En fait, ce n'est pas tant le quartier mais certaines clientes de ma maîtresse qui me font cet effet (et elles transitent dans le quartier, chère Frieda). Si ma maîtresse portait la moitié de ce qu'elles portent, elle ressemblerait à une petite aguicheuse écervelée mais ces femmes véhiculent une image de force qu'elle n'a pas et cette image, cette assurance leur permet de regarder les hommes de haut sans qu'aucun d'entre eux ose un geste déplacé, si vous voyez ce que je veux dire... fascinant sujet ;-)
Écrit par : Le vieux pull | lundi, 23 mars 2009
M1 usual suspect hein? :)
Écrit par : M1 | lundi, 23 mars 2009
J'adore !!! Moi qui vit dans une région grosse pourvoyeuse de pétasses.... Qui a été d'ailleurs assez "avant gardiste" en la matière, je lis ton post avec grand intérêt... Ainsi un écrivain s'était attardé sur le sujet? "afficher son pedigree libidinal en public?"
Bon, je note...
Écrit par : isabelle | mardi, 24 mars 2009
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