Doucement le matin, pas trop vite non plus l'après-midi

La première leçon date de 1992.

Aubade, c'est une pub qui fait école. Au sens propre comme au sens figuré. Il y a déjà bien des années, alors que je fréquentais l'amphi de l'Institut français de la mode, Ann-Charlotte Pasquier, PDG d'Aubade jusqu'en 2006, était venue nous en dévoiler les coulisses.

Il y a trois semaines, dans ELLE, Fonelle avait fait un essai d'anthologie du port au quotidien de la cuissarde Prada, celle qui a l'air d'une botte de pêche (à peine) retravaillée. Cette semaine, c'est Lauren Bastide qui arbitre, dans le numéro sorti vendredi, LA castagne de la saison : pour ou contre le port de la cuissarde ?

Les contre, je crois bien, ont dû abuser sérieusement du surf sur e-Bay... ou ailleurs. Sur leur rétine s'est imprimée ad vitam une image dans ce genre-là.

Ah, c'est sûr, je le concède bien volontiers, il y a là de quoi refroidir les plus vaillantes des ardeurs fashionistiques.

J'en ai vaguement cherché, sur e-Bay, des cuissardes vintage en début de saison. J'ai vite laissé tomber, je pensais Gainsbourg, Bardot et back to the early 70's (Jusques en haut des cuisses elle est bottée, et c'est comme un calice à sa beauté, tout ça, tout ça), tu parles, n'importe laquelle de mes requêtes m'expédiait illico à Pigalle. Monde cruel.

La mode nouvelle fait la couv' de ce numéro de ELLE du 25 septembre 1947, qui ne comporte que 24 pages.

Dans son édito "H. G.-L." (Hélène Gordon-Lazareff, bien sûr) revient sur la révolution dans la couture : les jupes sont beaucoup plus longues, les tailles beaucoup plus fines, les épaules effacées, les bustes soulignés avec insistance. Tout cela vous le savez... et vous êtes affolée. On vous a parlé d'une mode importable, excentrique, impossible. Aujourd'hui, vous allez pouvoir juger et "faire vos jeux".

La fondatrice de ELLE inisiste sur le fait que la haute couture française a contraint le monde entier à reconnaître sa suprématie et précise que le prochain numéro donnera aux lectrices cent idées pratiques pour adopter et "calmer" cette mode révolutionnaire.

Ce coup de théâtre qui signe une révolution est signé Christian Dior, de la ligne parapluie fermé qui s'oppose à la ligne parachute ouvert, de la  robe libellule en tulle blanc et ailée à son contraire, la robe serpent en drap noir, dépouillée et impitoyable.

Autre nouveauté (en haut à gauche), la robe de crépuscule, mi-longue, mi-nue.

C'est qu'il n'est pas en fashion diet, lui, le p'tit boy qui s'habille chaque saison en Castelbajac. Et il n'a pas fini de grandir non plus. On continue donc tous les six mois de dévaliser le rayon Jean-Charles de Castelbajac pour Okaïdi et cette fois, je lui piquerais presque sa besace.

Il a pourtant déjà prévu d'y trimballer ses - nombreux - bouquins sur l'aviation.