samedi, 31 mai 2008
Non merci, je crois que j'ai la migraine
Benetie aurait peut-être pu en faire une fumasserie.
Ben oui, j'ai cru comprendre, au détour d'un commentaire, que, sur ce coup-là, elle partagerait assez mon avis - avis que je ne suis jamais la dernière à communiquer, par parenthèse, surtout quand on ne me le demande pas, et je note d'ailleurs à ce sujet que ma catégorie C'est que mon avis est de loin la plus lue, comme quoi finalement je devrais peut-être le donner plus souvent, mon avis, mais bref.
Sur ce coup-là ? Un mauvais coup titre Libé, avec cet art du titre à double sens dont il a le secret.
Le coup de Sex & the City, pardi !
Tout a commencé sur la blogo, il y a déjà plusieurs mois, avec les photos du tournage et une sorte de buzz hystérique qui a vite menacé de me saoûler.
Ca s'est calmé, puis ça s'est remis à enfler avec la promo savamment orchestrée de la sortie ciné de ce 28 mai. A ce stade, je n'ai plus été saoûlée, j'ai carrément été prise de nausées.
N'ayant aucunement le projet d'aller voir ce qui m'apparaissait dès lors comme une belle promesse de daube en barre, je n'avais pas non plus l'intention de lui consacrer le moindre espace sur mon blog où je fais que ce que je veux.
Je n'irai certes pas au cinéma cette semaine, ni pour apercevoir SJP dans sa robe de mariée ratée (la robe et la mariée, si j'ai bien tout capté) ni pour y voir autre chose, le reste de la programmation ayant prudemment battu en retraite devant ce rouleau compresseur téléphoné. La lecture à deux jours d'intervalle ici et là de billets élogieux de blogueuses que j'apprécie a entrepris de me faire changer d'avis. Une page du Monde a hier emporté le morceau. J'allais donc balancer un peu de fiel, histoire d'alimenter le débat.
Apprendre que Patricia Field a oeuvré sur une ligne de vêtements commercialisée à l'automne par Mark & Spencer m'aura bien amusée l'espace de cinq minutes.
Pour qui l'ignorerait encore, Patricia Field, styliste sur la série et a fortiori sur le film éponyme, a pour son propre compte un sens de la mode tout personnel.
Quant à Mark & Spencer, si j'ai bien regretté sa décision de quitter la France de manière précipitée il y a quelques-années, c'était uniquement pour ses chutneys.
Pas pour son sens de la fashionnerie.
De toute évidence, voici un alliage qui promet. On reprendra bien un peu de Sex & the City à l'automne et pour Noël, on aura droit à la promo du DVD si peu imaginatif sous le sapin. Envisager qu'il puisse y avoir une suite cinématographique est pour le moment tout bonnement au dessus de mes forces.
Face à cette déferlante de Sex&thecity business, j'ai donc eu envie de donner un peu de place à une petite revue de presse non consensuelle.
Le film ne serait qu'un spot publicitaire de 2 h 25, avec pas moins de 80 placements de produits. Caradisiac s'en faisait déjà l'écho en décembre dernier. Mercedes y fait de la figuration avec son 4 X 4 GLK qui ne sera commercialisé qu'en octobre prochain. Selon le magazine spécialiste de la bagnole, Sex and the City est la série où l'on voit une paire de miches toutes les 8 minutes pour attirer les mâles devant la télé alors qu'ils en prennent plein la gueule pendant 22 minutes.
Mais pas sectaire, la série. Lorsqu'il s'agit de viser un large public, même les gays sont invités à la fête. Têtu rapporte ainsi que les quatre actrices ont donné une interview à deux bloggueurs gays new-yorkais. Sarah Jessica Parker explique: «La majorité de mes amis sont gays.» Ben tiens, c'te blague.
Dans Libé, on souligne combien l'esprit libertaire (pour ne pas dire libertin) des débuts est aujourd'hui rentré dans le rang du conformisme bien pensant : Il est indéniable que Sex and the City, tiré des chroniques de Candace Bushnell, a contribué au lifting des séries télé féministes à l’humour social pimenté. Devançant telles Desperate Housewives ou Weeds, le feuilleton, décliné sur 94 épisodes de 1998 à 2004, a connu un franc succès en privilégiant le franc-parler d’héroïnes capables d’appeler une chatte une chatte - et, plus encore, une bite une bite. Quatre profils complémentaires ont permis de balayer large le spectre de la libido et des affres sentimentales afférentes, insolence et dérision faisant, comme il se doit, avaler la pilule. Quatre ans après la fin de la série, le film brode sur le même canevas, tout en échouant à peu près sur toute la ligne : assumant le vieillissement des vedettes, il préconise un retour aux bonnes grosses valeurs morales (mariage, fidélité… et combien d’étagères dans le dressing ?) et, longtemps, souligne une tournure mélodramatique notablement poussive qui tourne à vide.
La chroniqueuse québécoise Nathalie Petrowski propose une analyse similaire. C'est comme si tout à coup, ce qu'on consommait passivement tard le soir sans trop y porter attention affichait, sous la loupe du cinéma, ses vraies couleurs. L'amitié entre ces quatre filles modernes, urbaines et émancipées demeure mais, cinéma oblige, elle a été mise au service d'une autre histoire: celle en fin de compte de quatre pétasses privilégiées et bourrées de fric qui ne foutent rien de leurs 10 doigts sinon s'acheter des godasses hors de prix, bouffer dans des restos chic et caler des Cosmos en se plaignant des hommes même quand ces derniers ne leur ont rien fait. Ou si peu. Sur les intentions du film, je rejoins totalement son point de vue : Certains scénaristes ont la mauvaise habitude de vouloir écrire des histoires sur mesure pour des clientèles ciblées. C'est une mauvaise idée qui donne le plus souvent de mauvais résultats, puisque le scénariste ne part pas d'un élan personnel mais d'une intention: celle de manipuler sciemment le public. Or, même si le cinéma est manipulation par essence, pour bien manipuler encore faut-il partir du principe que les gens à qui l'on s'adresse sont intelligents.
Il y a 10 ans, j'avais trouvé à cette série un ton piquant et novateur qui s'est dilué au fil du temps, au point que j'en étais rapidement arrivée à complètement oublier de la regarder, jusqu'à ce phénomène d'aversion qu'elle déclenche chez moi aujourd'hui. La flamboyante intellectuelle et pamphlétaire américaine Camille Paglia a déjà écrit que Sex and the City consacrait la victoire des féministes post-modernes, celles qui n'ont pas peur du sexe ni de leur féminité. C'était peut-être le cas avec la série télé mais avec le film, la seule victoire qui se dessine à l'horizon c'est celle du fric, du statut social et des sacs Louis Vuitton conclut Nathalie Petrowski.
Finalement, ce week-end, j'irais volontiers au cinéma, si je pouvais choisir la programmation. A tous les coups, j'aimerais bien revoir Sophie Calle et son No Sex Last Night.
00:54 Publié dans C'est que mon avis | Lien permanent | Commentaires (26) | Tags : mode, ciné | del.icio.us | Facebook